Elle sentit sa présence juste derrière la porte, et il lui sembla qu’elle n’avait jamais autant été sur ses gardes. Comment osait-il avoir le culot de venir la blesser dans l’endroit ou elle s’était réfugiée ? Cette fois, elle aurait souhaité que Kyllian soit à ses côtés pour avoir la force de la défendre. Mais, elle était bel et bien seule, face à ce monstre, l’empereur de son cœur qui lui ferait très certainement ravaler son affront. Satis l’avait menacé, pourtant, elle le connaissait bien. William n’obéissait qu’à lui-même quand les Fondateurs avaient le dos tournés. Elle savait que menacer un homme comme lui, ne lui donnait que l’envie de continuer à la martyriser. Elle songea, dans un moment de lucidité totale, que cette douleur qui s’était encrée en elle depuis ces quatre cent dernières années, ne pouvait plus être guérie, et que si par malheur William venait à disparaître, elle ne deviendrait qu’une ombre errante dans les limbes qu’était sa vie. Se sentir aussi faible, aussi piégée entre les mains de ce Vampire affolait à tel point la jeune femme qu’elle haït plus encore le Gardien. Cette fois, Satis le vit pousser la porte, et il apparut, avec la splendeur d’un ange des Ténèbres, le visage comme prisonnier d’un étau de glace et d’indifférence. Satis Baldwin ne méritait pas l’indifférence. De personne, pas même des Fondateurs.

« C’est chez moi, Satis »

Les répliques de Satis n’était qu’un flot de haine, de rage qui n’en finissait pas, qui sortaient si vite de sa bouche qu’elles quittaient aussitôt vite sa mémoire. Il lui semblait qu’elle disait tout et son contraire, tout sauf la vérité. Détestant son assurance affichée, son sourire hilare, ses yeux d’acier… Elle maudissait tout ce qu’il était, mais ne parvenait jamais à le haïr Lui, et c’était peut être cela la vraie raison de sa colère. Parce qu’au fond, malgré tout ce qu’il était, tout ce qu’il faisait, il était le seul à régner dans son cœur, et cela pour l’éternité qui leur était accordée. Voilà sans doute pourquoi ils étaient nés, quels desseins ils se devaient d’accomplir. Pour se haïr, pour s’aimer. Voilà aussi pourquoi elle se dégoutait elle-même de faire faussement penser Kyllian qu’un jour elle oublierait William. Elle joignit les gestes à la parole, le frappant jusqu’à ne plus sentir ses mains. Se faisant plus mal à elle-même qu’à lui, elle en avait bien peur. Se meurtrir physiquement permettait d’oublier cette autre douleur, tapie dans l’ombre. Elle ne s’arrêtait plus, en aurait pleuré de rage s’il lui était resté quelques larmes. Puis, ses coups se firent moins violents, plus lents aussi, quand elle se rendit compte qu’il ne bougeait pas, et qu’elle était si proche de lui. Les lèvres serrées, tremblante, elle releva son regard métallique vers lui, se demandant ce qu’il allait faire. La douleur était insupportable, si bien qu’elle recula jusqu’au mur, serra ses mains jointes contre sa gorge, les yeux mis clos. Quelle Abomination était-elle pour que Dieu veuille la punir ainsi ? Car oui, malgré les apparences, Satis avait gardé de son humanité, étant élevée dans des temps anciens, un certain attrait pour la religion. Ce que bien sûr, personne ne savait. Pourquoi avait-elle si mal ? Pourquoi ne pouvait-elle tout simplement pas dire la vérité ? Parce qu’il partirait, elle le savait. Parce qu’il se moquerait d’elle encore une fois, lui dirait qu’il n’avait jamais rien espéré d’elle, qu’il n’avait même jamais éprouvé, même une once d’affection pour elle, qu’elle n’était qu’un vulgaire jouet, comme tant d’autres avant elle. C’était pour cette raison qu’elle se devait de résister. Parce qu’en résistant, Satis était sûre qu’il continuerait à s’intéresser à elle, même pour la martyriser. Alors, finalement, peu importe la douleur, puisqu’elle c’était tellement ancré en la jeune femme, qu’elle en était devenue habituelle. Haletante, elle fixa William. Quel plaisir éprouvait-il à la faire souffrir ainsi ? Parce que cette fois, elle s’était trahit. Si d’ordinaire, au visage de Satis ne se disputaient que le dédain, l’ironie et la froide cruauté, cette fois, il exprimait la douleur. La douleur profonde qu’elle essayait tant de lui cacher. Mais cette fois, elle s’avouait vaincu.

« Tu oses même venir me blesser dans l’endroit ou je me réfugie ? Le Créateur t’a donc fait à ce point vil et cruel ? Je ne veux plus que tu m’approches, William. Je ne veux plus que tu te serves de moi pour te distraire. Tu sais très bien qu’à ce jeu, je ne joue pas puisque tu gagnes. Alors sois satisfait, tu gagnes. »

Elle s’appuya, comme pour se soutenir au lavabo, et n’osa même pas regarder cette couleur océan qui l’a mettait dans tous ses états. Voilà, elle rendait les armes. Quatre cent ans de guerre que la belle Satis menait contre lui prenait fin, cette fois ci. Elle songea à Kyllian, et se dit que peu être avec le temps, elle serait heureuse à ses côtés. Qu’il pourrait peut-être lui faire oublier cet envoutement qu’elle avait pour William. Satis fronça ses sourcils. Malgré sa douleur, elle se releva complètement. Non, elle ne pouvait pas s’en aller en laissant le plaisir de la victoire à William. Tout en s’observant dans la glace, elle nota que le sang qui s’écoulait de sa gorge avait enfin séché sur sa peau, laissant des traces sur son cou d’un pourpre intense. Un sourire caustique vint étirer ses traits. Elle n'était pas une fillette, et Satis Baldwin ne s'abaissait pas, pas même devant William Smith. Aussi rapide que l’éclaire, Satis bondit, et envoya William s’écraser contre le bois de son lit, lui coupant le souffle. Elle releva les pans de sa robe désormais tachée de sang et alla le rejoindre, avec toute la grâce d’une fille de la Lumière. Les crocs dénudés, elle enjamba le corps de William, s’assit sur lui et les ongles effilés comme des griffes, lui laboura les joues, toujours avec son sourire ironique.

« Finalement, je crois que je ne vais pas te faire ce petit plaisir, William. Tu es à moi, et on a encore toute la nuit »

Aussi étrange que cela puisse paraître, Satis ne pensait pas pouvoir un jour montrer cette facette de sa personnalité à William. Il l’a connaissait cruelle, froide, arrogante, tenant toujours tête. Invivable, en somme. Pourtant, cette Satis fragile, réfléchie, douce, elle ne l’avait été qu’avec Kyllian, et personne d’autre. Peu savaient que Satis pouvait faire preuve de compassion, qu’elle n’était pas qu’une écorchée vive, qu’il lui restait une part de son humanité. Car humaine, la belle Satis n’était pas comme ça. Oh non, elle charmait par son charisme, par sa prestance tous les hommes qu’elle côtoyait. Sa physionomie d’ange, annonçait la pureté de son âme, car, si son père était cupide et manipulateur, sa fille restait aimable et douce. Comment son créateur n’aurait-il pu ne pas résister à son charme ? Rafael aimait les femmes. Cet hispanique, bien que noble, était connu pour ses conquêtes, et Satis était la perle rare qu’il voulait ajouter à sa collection. Si bien que, en l’a laissant livrée à elle-même, livrée au monstre qu’elle était, la personnalité de la Lady avait changé, lorsque, assoiffée, elle était devenue incontrôlable. Elle avait apprit que, dans ce monde d’égoïstes, seuls les plus forts pouvaient survivre, alors c’est ce qu’elle était devenue, laissant ses instincts sanglants prendre le dessus sur sa personnalité. Au lieu de combattre le démon qu’elle était, Satis s’était complètement laissé envahir pas lui. Alors, se montrer si douce et aimable envers William, ce vampire qui l’a martyrisait depuis si longtemps, Satis s’en étonnait elle-même. Elle ne se reconnaissait plus. Ses mots gentils, sincères, elle les avait toujours destinés à Kyllian, et, les donner à William, c’était comme le trahir une nouvelle fois. Mais mettre fin à cette guerre, c’était tiré un trait sur William, et ça, Satis n’était pas sûre de le vouloir.

Voilà, c’était dit. Enfin, d’une certaine manière. Elle lui avait dit qu’elle l’aimait beaucoup, n’était-ce donc pas assez transparent ? « J’ai besoin de réfléchir. » La belle fronça les sourcils. Qu’est ce que ça voulait dire ? J’ai besoin de réfléchir à « William je t’aime beaucoup », ou… ? Mais avant qu’elle n’ait pu faire quoique ce soit, le Vampire se dirigeait déjà vers la salle de bain. Quelques secondes plus tard, elle entendit l’eau de la douche se mettre à couler, signe que William avait simplement besoin d’être propre. Il n’avait donc rien à lui dire ? Devait-elle rester ? Ce qui était certain, c’était qu’elle ne pouvait pas sortit dans le couloir, à moins de vouloir ameuter tous les Nights à cause de l’odeur ferreuse et sucrée de son sang séché sur sa peau. Elle avait besoin de se sentir plus propre. Se sentant comme chez elle, Satis se permit d’ouvrir le placard de William, et de trouver, dans un des recoins, une sorte de trousse de secours, s’il y avait par mégarde un accident avec un Day. Dedans, elle y trouva des cotons et du désinfectant. C’était mieux que ce qu’elle avait espéré. Elle s’empara du coton, le noya dans l’alcool, avant de le passer rigoureusement sur sa gorge, afin d’enlever le sang. Au niveau des deux trous laissés par le Vampire, l’alcool piqua sa peau gracile, et, Satis arracha une grimace de douleur. C’était, comme si soudain, le feu s’était glissé à l’intérieur de ses veines, la pétrifiant pendant plusieurs secondes. Une fois la chose faite, elle rangea la trousse là ou elle l’avait trouvé, referma silencieusement le placard, et retourna s’assoir, ou plutôt s’appuyer sur le haut de bois vernit du lit, face à la porte de la salle de bain. William, ne tarda pas à en sortir, vêtu d’un simple peignoir couleur d’encre. « Satis ? » L’appela-t-il, comme pour vérifier qu’elle était toujours là. C’était bien le cas. Assise, elle releva la tête vers lui, comme émergeant d’un rêve. Il s’approcha doucement, avec une expression qu’elle n’était pas prête d’oublier. « Je n’ai pas envie qu’on fasse comme si de rien était. Je t’ai jamais détesté, je faisais semblant... Te provoquer, te voir fâché, c’est vrai que c’est excitant... Je sais que si je te lance des bêtises, que tu me répondras toujours, peu importe ce que c’est... Tu me donne de l’attention. C’est comme ça et ça a toujours été ainsi... Mais si tu crois que tu me laisse indifférent, c’est le contraire. Et tu es bien la seule qui a réussit à me supporter. Et la seule que j’ai pas vraiment rejetée... Même si t’es dingue, si tu serais la plus méchante des vampires, la plus cruelle... J’avoue être sado-maso , j’aime ça . » Il rit, alors que le cœur de Satis se soulevait dans sa poitrine. Ses yeux argents cillèrent, sous le flot de paroles du jeune homme, qui l’a heurta avec force, si bien qu’elle ne put ressentir aucune sensations pendant plusieurs secondes. Tout ce temps, il avait feint de la détester. Tout ce temps, elle s’était crue rejetée par William, alors qu’il n’en était rien…Mais, pourquoi ce regard haineux ? Pourquoi ces paroles si blessantes ? Elle se sentait si chamboulée, si déstabilisée… Combien de fois Kyllian avait du faire taire ses pleurs parce que William faisait semblant de la détester ? Parce qu’elle ignorait qu’il aimait la voir en colère. Parce qu’il aimait qu’elle lui réponde, sur le même ton qu’aucun autre Vampire n’aurait employé avec lui. La haine de Kyllian pour William était vaine. Tous comme sa souffrance. Si les tourments de Satis s’étaient allégés, elle fut de nouveau assombrie par ce fardeau. Voilà près de deux ans que Kyllian souffrait en silence, pour elle, pour son bonheur. Parce que William était égoïste, parce qu’il aimait la voir dans tous ses états. Etait-elle aussi égoïste que William, pour faire comme si de rien n’était ? Pour continuer d’embrasser Kyllian, alors qu’il souffrait de ses absences ? Alors qu’il savait très bien que les pensées de Satis allaient pour un autre ? Les questions se bousculaient dans sa tête, si bien qu’elle ne remarqua pas qu’il levait sa main vers elle et caressait ses cheveux ébène. Depuis quand, était-il si doux, avec elle ? Pendant ce temps, il s’était allongé sur son lit, et l’observait du coin de l’œil. « Il me semblait que c’était pour dormir que tu étais venue ? » Satis se releva du haut de lit, et se tourna vers lui. Elle n’était pas idiote, la jolie Vampire. Elle savait ce que ça voulait dire. Elle lui avait dit qu’elle l’aimait beaucoup, et il venait de lui répondre qu’elle ne lui était pas indifférente. C’était un grand pas. Un miracle, même, mais, elle ne pouvait se résoudre à trahir Kyllian. Son bel ange gardien, qu’aurait-elle fait sans lui ? Fixant le jeune homme, Satis préféra se laisser tenter par le Diable. Finalement, elle était trop lâche pour se poser ces questions gênantes. Trop lâche pour résister à la tentation qu’était ce ténébreux Vampire. Alors, elle contourna le lit, releva les pans de cette sulfureuse robe noire tachée de sang, et s’allongea à ses côtés. L’horloge murale affichait minuit passé. Sauf, que, sentir William si proche d’elle, et si calme l’a rendait nerveuse. Couchée sur le ventre, elle releva la tête, posant son menton dans le creux de sa main. Elle observa ce beau Diable qu’était William, admirant silencieusement ses très réguliers, le bleu lagon de ses yeux mis clos, puis l’éclat chatoyant de ses cheveux brun. Un sourire aux lèvres, Satis songea douloureusement qu’elle aimait et l’homme, qu’était William, et le monstre qui habitait en lui. Ces deux facettes de sa personnalité, qu’elle avait apprit à aimer, à connaître avec le temps, ne lui faisait plus peur. « William ? » murmura-t-elle, comme s’il avait été la chose la plus précieuse qu’elle n’eut jamais possédée. Elle eut un sourire amusé, alors qu’elle posait sa tête contre son épaule, s’imprégnant de son parfum subtil. « Tu voudras bien réparer mon lit ? » Être si proche de lui ne lui faisait plus peur. Avoir posé sa tête contre lui, respirer son odeur, elle se demanda si finalement, Dieu ne l’avait pas oublié, tant elle se sentait en paix avec elle-même, la douleur disparue, tout comme ses doutes. Elle passa doucement son index sur les stries, cicatrices rougeâtres, que ses doigts assassins avaient tracés sur sa peau, et rit. « Ca te va mieux comme ça, je trouve. Tu ressembles à un guerrier. » Heureuse, sécurisée, elle consentit enfin à fermer les yeux pour tomber dans un sommeil sans rêves.

Au fond, ce sommeil léger et réparateur lui était bénéfique. Pour la première fois depuis bien longtemps, sa nuit n’avait pas été témoin de ses cauchemars sanglants, souvenirs de son passé douloureux. Si bien qu’elle émergea lentement de ce sommeil sans rêves, alors que son compagnon embrassait la peau de ses joues. Ses paupières fermées papillonnèrent avant de s’ouvrir, laissant à William le soin de découvrir deux prunelles métalliques ou brillèrent quelques instant une certaine sérénité.

« Debout paresseuse… » lui dit alors le Vampire en guise de bonjour, auquel elle répondit par un petit gémissement significatif du sommeil duquel elle émergeait.

Il sembla à la belle anglaise qu’aucun de ses réveils n’avaient été aussi doux et agréable. Pourtant, elle ne pouvait toujours pas, même après cette nuit passée à ses côtés, mettre des mots sur ses sentiments, et lui dire réellement le fond de sa pensée. C’était si frustrant, et à la fois si nouveau pour elle. Un peu comme si deux amoureux de collège se retrouvaient cinquante ans plus tard, ayant chacun mener leur vie de manières différentes, rencontrer des gens différents. Aucun mot ne pouvait décrire cela. Pour décrire à quel point deux personnes pouvaient être proches et si éloignées à la fois. Et voilà sans doute pourquoi le bonheur de Satis n’était pas comblé. Elle avait pourtant, quelque part, l’assurance qu’il était à elle, et à elle seule, malgré toutes ces amantes qu’il fréquentait. Mais le doute persistait vicieusement dans son esprit. Ce ridicule petit doute la mettait dans des états incroyables. Des moments ou sa rage jaillissait du plus profond d’elle-même, lui donnant parfois la désagréable impression de ne plus être maîtresse de la situation, et encore moins d’elle-même. La peur d’être abandonnée, comme l’avait fait si perfidement Rafael avant lui, s’insinuait jusqu’au creux de sa chair et lui rappelait douloureusement le monstre qu’elle avait été. Cette peur que William lui échappe et s’en aille, peut(être avec une autre, lui était insupportable.

Elle remarqua qu’il l’a serrait contre lui, et se demanda alors s’ils s’étaient réveillés dans cette position. Lentement, ses doigts allèrent caresser les jours de ce beau Diable, alors qu’elle admirait une fois encore ce beau visage dont elle ne se lasserait jamais. Aussi proche de la haine qu’ils pouvaient l’être, quand quelque fois l’amour ne les séparaient que d’un seul pas, Satis songeait que cet étrange mélange de sentiments leur convenait parfaitement. Il en allait ainsi pour William et elle, l’empereur de son cœur, et cela pour l’Éternité. Étant des êtres « morts » elle savait que les Vampires ne vivaient généralement que d’émotions entières telles que la colère, la force de destruction ou bien même l’amour. Mais pas un amour digne des plus grands protagonistes de la Littérature, non. Un amour destructeur, une passion pour l’autre dont Satis s’était dangereusement prise dans l’engrenage. Un jeu dans lequel elle n’était pas sûre de sortir victorieuse, tant elle pouvait se sentir coupable pour Kyllian. Elle l’aimait. D’une façon différente de ce qu’elle éprouvait pour William, mais elle l’aimait. Elle avait besoin de lui, de sa présence, de ses bras autour d’elle. Elle admirait chez lui le calme et le courage dont il faisait preuve lorsqu’elle revenait en pleurs contre lui, parce que la souffrance que lui procurait un autre était insoutenable. Il avait apprit à haïr un Vampire en silence, sans jamais se doute qu’il s’agissait de son meilleur ami. Si elle avait encore été ce monstre terrorisant les ruelles de Londres, la belle Satis se serait jouer de ses deux hommes, or, elle était tellement attachée à eux qu’elle était incapable de profiter de sa situation. Mais que se passerait-il alors, si elle révélait aux deux Vampires l’abjecte vérité ?

*Alors c’est tout ? Tu vas réellement t’éloigner de William pour ne pas blesser plus encore Kylian ? Ne crois tu pas que c’est un peu tard, Satis ? Tu essayes de te détacher de William alors que tu sais pertinemment que tu ne peux pas vivre sans lui. Tu n’as même jamais essayé. Pauvre idiote, la seule chose que tu vas réussir à faire, c’est de les faire souffrir tous les deux, et toi avec. Et quand tu seras totalement brisée, comme une coquille vide battue par tous les vents marins, Calvin ne fera qu’une bouchée de toi, nous le savons toutes les deux… *

La jeune femme se redressa, écartant les boucles brunes de son visage angélique. Elle regarda William, qui s’était redressé à son tour et la fixait avec une attention nouvelle. Prenant le peu de courage qu’il lui restait entre les mains, elle se pencha vers lui, effleura ses lèvres avant de l’embrasser. Chose faite, son visage reprit alors l’expression glaciale qu’il avait toujours arboré du temps ou la haine n’était qu’un masque camouflant ainsi l’amour qu’ils se portaient. Elle resta près de lui, éloignée simplement de quelques centimètre de son visage.

« Tu es pitoyable Smith. Tu l’as toujours été mais c’est de plus en plus flagrant. Et je le suis encore plus de t’avoir laissé jouer avec moi si longtemps. Mon cœur quelque un d’autre en a emporté les débris ensanglantés là ou les grilles te resteront à jamais fermées. »

Mensonges. Grossières facéties dont il ne pouvait être dupe, Satis le savait mieux que quiconque. Mais peu importe l’incendie qui ravageait son cœur à cet instant précis, peu importe qu’il détruise tout sur son passage puisque c’était pour lui qu’elle faisait ça. Pour protéger Kyllian, également. A moins que ce ne soit cette dure lois de l’attirance et de la répulsion qui guide tous ses gestes. Son petit rire narquois retentit alors dans la pièce.

« Quoi ? Tu n’as quand même pas donné raison à la comédie que je te joue depuis hier ? Ne me dis pas que j’ai réussit à avoir un Vampire soit disant plus âgé et plus expérimenté que moi ? Enfin amour, la trahison est une seconde nature chez les femmes, tu devrais le savoir mieux que quiconque… »

« Et alors ? »

Les yeux de la belle cillèrent, déstabilisés, scrutant le visage de cet amant d’une nuit à la recherche de la moindre faiblesse, le moindre signe qui lui permettrait de reprendre le dessus. Non, il ne pouvait pas réagir ainsi. Il n’avait tout bonnement pas le droit ! Pourquoi n’était-il pas en colère ? Et puis, finalement, pourquoi se sentait-elle déçue qu’il ne lui donne pas la gifle qu’elle méritait depuis la veille, qu’il lui montre que ce qu’elle lui disait lui faisait mal ? Parce que oui, c’était la toute la complexité du caractère sanglant de la belle, à cet instant, elle ne rêvait que de le voir plié de douleur. Elle jubilait à l’idée de le voir rampant à ses pieds, comme tous ces stupides humains qui avaient eut la vantardise de croire la posséder. Et malgré ça, elle ne pouvait empêcher son si précieux palpitant de battre pour ce misérable Vampire. Maudit soit-il, lui et tout ce qu’il était. Croyait-il seulement qu’elle était devenue la bête terrifiante des rues de Londres, pour se faire soumettre par un homme ? Elle en tremblait de rage et de chagrin. Cependant, la vision d’un William dont la carapace de l’orgueil se fendait petit à petit effaça tout le reste. Il se sentait insulté, elle le savait. Trahit peut-être, elle pouvait le deviner. La belle aurait pourtant voulut le réconforter. Lui dire qu’elle était toute à lui, qu’elle souhaitait simplement le protéger, mais, Satis ne connaissait pas cette arme des mots, tellement habituée à jouer la comédie qu’il devenait presque difficile pour elle d’être sincère avec les gens qui comptait vraiment. Elle l’entendit soupirer, puis sourire. Pourquoi ce fichu sourire ne quittait jamais ses lèvres ? Pourquoi avait-elle toujours la désagréable impression qu’il était imperméable à toutes émotions, et qu’il avait toujours une longueur d’avance sur ce qu’elle entreprenait de faire…? Elle vit la main de son compagnon se lever vers elle, et elle crut qu’il allait lui donner de froid la gifle qu’elle n’avait pas encore reçu. Mais, il n’en fit rien, et plus tard, dans les moments sombres, Satis se souviendrait de ce simple geste qu’il avait fait. L’attirer à lui, comme pour faire taire tous les sarcasmes qu’elle se sentait obligée de débiter devant lui. Comme pour lui prouver qu’elle se mentait à elle-même, et, elle n’avait pas chercher à éviter ses lèvres, bien au contraire. Lorsqu’il cessa de l’embrasser, qu’il sourit -toujours ce même et satané sourire qu’elle détestait tant- elle fut presque honteuse de se sentir à ce point anéantit. De réaliser qu’elle n’était rien sans lui, et, durant quelques secondes, la perspective d’être à ce point dépendante de lui l’a terrifia. Il reprit possession de ses lèvres, cette fois avec plus d’entrain, de passion, ne cherchant plus à essayer de la tromper. Leurs langues se trouvèrent, s’entremêlèrent leur rappelant furtivement leur escapade de la veille. C’est lorsqu’il embrassa son cou qu’elle se rendit compte à quel point elle s’était rapprochée de lui, sans qu’il ne l’a tienne ou n’exerce aucune pression sur elle. Instinctivement, elle avait baissé sa garde, laissé ses émotions la submerger, puis avait autoriser ses mains avides, courir le long du torse de son compagnon. Mains qu’elle retira presque automatiquement, chose qui ne fit que renforcer son idée que William avait parfaitement comprit son petit manège, et qu’il essayait par la force des chose de lui prouver qu’elle se fourvoyait.

« Je sais quand tu mens, mon Ange. J’ai appris à te connaître, et là tu n’es pas aussi sûre que tu ne l’étais avant. Tu ne me détestes pas, tu le nie pour te donner un sentiment de puissance. L’orgueil... »

Il avait tout comprit, et les grands yeux aciers de Satis s’agrandir sous le coup de la surprise. Il l’a connaissait mieux qu’elle ne l’avait jamais soupçonné. Depuis combien de temps, alors, se jouait-il d’elle ? Quand serait-il enfin sincère ? De toute façon, pourquoi espérait-elle la sincérité de ce Vampire, alors qu’elle-même ne cessait de lui mentir pour protéger le peu d’amour propre qu’il lui restait. Des frissons la parcoururent alors qu’elle sentait le souffle de son beau Diable dans son cou, et sa main épouser les courbes de son corps pour arriver jusqu’à sa cuisse. Pourquoi la tourmentait-il ainsi ? Elle tourna la tête, ses lèvres effleurant la peau des joues de William. Le savoir si proche l’a faisait frissonner de plaisir bien qu’elle essaya tant bien que mal de son contenir devant lui, peinant pour calmer les palpitations de son précieux.

« Met tes sentiments de côté, rien que pour l’instant. »

Elle sentit les lèvres de William courir sur la peau de ses épaules, alors qu’instinctivement, la belle se collait au vampire, ses canines s’allongeant sous l’effet du désir. Sous l’emprise de cette sensation impétueuse, Satis alla bientôt embrasser la peau d’albâtre de son cou, s’empreignant de cette odeur qu’elle reconnaîtrait entre mille. Et, alors que ses mains allaient et venait contre le torse de son amant, l’idée qu’il puisse l’aimer malgré tout ce qu’elle était, tout ce qu’elle lui faisait subir naquit dans son cœur et se répandit dans ses veines à la vitesse d’un poison mortel. Cette idée était tellement contradictoire, qu’elle-même eut du mal à y croire. Et s’il se jouait d’elle depuis le début ? Voilà plus de trois siècles qu’elle le côtoyait, et elle avait apprit de William une chose : qu’il savait être patient. Or le petit jeu qui s’était instauré entre eux avait prit une tournure plus dangereuse et plus vicieuse encore qu’elle ne l’était au début. L’évidence s’imposa alors à elle. Tout comme Calvin avant lui, il savait tirer parti de chaque situation, tirer les ficelles jusqu’à ce que la proie soit prise au piège. Et cette fois, il n’y avait plus d’échappatoire pour elle. Sans décoller le jeune homme, ses assassines s’agrippèrent à sa mâchoire, le forçant à la fixer dans les yeux. Ses lèvres retrouvèrent le chemin des siennes sans aucune difficulté puis, elle lui murmura à l’oreille, d‘une voix étonnamment calme, presque amusée par la facilité du flot de mot qui sortaient de sa bouche, cette fois, non comme des armes, mais purement et simplement comme preuve de sincérité.

« Puisse nos routes jamais ne s’être rencontrées, William. Le pire c‘est que tu sais que tu as raison. Je ne te déteste pas. J‘essaye de te détester, mais le résultat est là : je ne peux pas. Tu dis que je suis orgueilleuse, mais la vérité, c‘est que tu me pousses chaque jour à l‘être un peu plus. Tu as fais de moi ce que je suis, William, alors ne me reproche pas, d‘essayer d‘être quelqu’un d‘autre. D‘être cette Satis qui un jour réussira à t‘éclipser de ma vie pour de bon. Tu me dis de faire attraction de ce que je ressens, mais ça ne marche pas comme ça. Je pensais que le jeu s‘arrêterai quand je l‘aurai décidé, mais j‘avais tort. J‘ai joué, et je me rends compte que je perds contre toi William. Parce qu‘ils sont là, ces satanés sentiments. Ils sont là et à cause de toi ils ne cesse de me tirailler de toute part, juste pour ton bon plaisir. »

Elle leva ses yeux vers lui, l’embrassa encore, plus longuement cette fois ci. Délaissant sa mâchoire du jeune homme pour laisser gambader ses mains sur son torse.

« Rien ni personne ne pourra empêcher Monsieur de me faire souffrir s’il a envie, n’Est-ce pas ? Tu es comme Calvin. Tu fais ce qui te plait quand bon te semble sans te soucier des conséquences. Mais c‘est moi qui trinquerait, comme d‘habitude. Que crois-tu qu‘il fera quand il saura ce qu‘on vient de faire ? Je lui appartiens n’oublies pas. Comme une esclave, je lui appartiens corps et âme, malgré toutes mes protestations. »